Naufrage dans l'Atlantique - Sur 61 personnes en route pour les îles Canaries, seules 24 survivent

Depuis le 20 juin, Alarm Phone a de nouveau été témoin d’un terrible naufrage aux frontières extérieures de l’Europe.

Peu après 19h, mardi soir, nous recevons les premières informations sur un bateau en détresse, parti de Boujdour vers les îles Canaries. Il y a entre 59 et 70 personnes à bord, dont 6 femmes et un enfant.

A 19h55 CEST, nous parlons pour la première fois aux personnes à bord. Elles sont paniquées, car le bateau prend l’eau, et certaines personnes sont à l’eau. Elles nous disent que trois personnes ont déjà perdu la vie. Nous alertons immédiatement les garde-côtes espagnols, à 20h10 CEST, en transmettant toutes ces informations. À 21h10, nous obtenons la bonne position GPS, que nous transmettons tout de suite aux autorités.

À partir de 21h19 CEST, les sites de suivi maritime indiquent qu’un navire marchand, le Navios Azure, change sa route et se rapproche de la position GPS que nous avons reçue. À partir d’environ 23h CEST, leur position apparaît proche de l’embarcation en détresse.

À 00h04 CEST, nous parvenons à rétablir le contact avec les personnes à bord : “S’il vous plaît, sauvez-nous, nous sommes en train de mourir”.

À 00h54 CEST, les garde-côtes espagnols confirment qu’un navire marchand est sur zone, mais que l’opération de sauvetage est coordonnée par la marine marocaine. À 01h14 CEST, nous appelons la marine marocaine, que nous alertons également par e-mail. Toute la nuit, les autorités marocaines restent indifférentes. Au cours de la nuit, nous essayons également, en vain, de contacter le navire marchand Navios Azure pour lui expliquer qu’il est de son devoir de porter immédiatement secours au bateau en détresse. La situation de détresse devrait être claire pour ce navire marchand, étant donné que les 59 personnes se trouvent sur un dhingy en caoutchouc, totalement inadapté pour voyager sur l’Atlantique, et qu’il y a déjà des personnes dans l’eau. Néanmoins, le navire marchand ne vient pas en aide aux personnes qui luttent désespérément pour leur survie.

Ce n’est que vers 4h CEST qu’un navire de la marine marocaine (l’Al Manar) quitte le port de Boujdour. Il arrive au niveau de l’embarcation en détresse autour de 7h30 CEST. Lorsque nous parvenons enfin à joindre le MRCC de Rabat, à 09h01 CEST, on nous informe que l’Al Manar a secouru 24 personnes rescapées, et qu’il poursuit ses recherches.

Tout au long de la journée, nous continuons à espérer des nouvelles d’autres survivant.es, mais lors des différents appels aux autorités, celles-ci partagent le même bilan : le sauvetage de 24 survivants et la découverte de trois corps. À 20h45 CEST le 21 juin, un proche nous informe que le nombre total de personnes ayant voyagé sur le bateau était de 61 personnes, ce qui porte le nombre de disparu.es à 34 personnes.

Nous sommes extrêmement tristes et en colère face à cette perte délibérée de vies humaines. Nous demandons des explications sur les raisons pour lesquelles le navire marchand est resté immobile toute la nuit pendant que le naufrage se produisait. Sur les raisons pour lesquelles un bateau de sauvetage n’est arrivé sur place que vers 07h30 CEST, alors que nous avions communiqué une position GPS aux autorités dix heures plus tôt.